Dans le cadre de la 6e réforme de l’État, les compétences des Maisons de justice ont été transférées à la FW-B le 1e juillet 2014. Annie Devos (Directrice générale des Maisons de justice) et Gaëtan Grifnée (Assistant de justice à Namur) nous expliquent leurs missions.
Les Maisons de justice ne sont pas encore très connues du public. Pouvez-vous nous expliquer ce qu’elles font et avec qui ?
Annie
Devos : « La
Belgique compte 28 Maisons de justice. Après
les drames qui ont secoué notre pays en 1996, les décideurs politiques ont pris
différentes mesures, dont celle de regrouper plusieurs services parajudiciaires
au sein d’une seule et même structure. Les Maisons de justice sont créées en
1999 avec l’objectif de rendre la Justice plus accessible, ouverte et efficace.
Elles prennent aujourd’hui en charge plus de 65.000 nouveaux dossiers par
an. Ces nouveaux dossiers, qui concernent des missions très variées, sont
confiées aux Maisons de justice par des autorités judiciaires (par exemple le
procureur du Roi, le tribunal de l’application des peines) ou des autorités
administratives (par exemple un directeur de prison). Au sein des Maisons de
justice, ce sont des assistants de justice qui assurent le suivi des dossiers.
Les Maisons de justice s’occupent essentiellement de l’exécution des peines dans la communauté, c’est-à-dire des peines et mesures qui ne sont pas des peines exécutées en prison et qui s’adressent aux majeurs (la libération conditionnelle, la peine de travail, la probation…). Nous assumons également trois autres types de missions : l’accueil des victimes, des missions civiles lorsque l’on intervient à la demande d’un juge dans le cadre de l’exercice de l’hébergement des enfants ou de l’autorité parentale, et l’accueil social de première ligne. »
Quels sont les aspects importants du travail de l’assistant de justice ?
« Nous faisons ce qu’on appelle du travail social
sous mandat. Nous travaillons avec une décision judiciaire et mettons en place
une méthodologie spécifique qui s’appuie, pour le volet pénal, sur l’aide et le
contrôle. L’assistant de justice doit vérifier le respect des conditions fixées
par l’autorité mandante et aider le justiciable à les respecter. Le justiciable
est évidemment le moteur, mais il faut qu’il ait une aide professionnelle pour
y parvenir, avec ce double mécanisme d’aide et de contrôle.
L’assistant de justice est un professionnel de la relation. C’est son plus grand outil de travail. Il faut voir avec une personne comment la mobiliser, comment la responsabiliser sans agir à sa place, sans être normatif. L’autre outil important, c’est le rapport; puisque la majeure partie de nos interventions font l’objet de rapports qui doivent permettre la prise de décision. »
En ce qui concerne la communautarisation, pouvez-vous nous expliquer brièvement dans quel contexte elle intervient ? Pourquoi la Fédération Wallonie-Bruxelles ?
« Ce transfert est la conséquence d’un accord
politique. Les missions que nous accomplissons sont des missions que
l’on effectue dans la communauté, dans la société civile. La Fédération
Wallonie-Bruxelles est, en ce sens, quasiment notre lieu d’accueil « naturel ».
Elle gère des matières qui touchent à la citoyenneté. L’humain, en tant que
citoyen, est également au centre de l’intervention des Maisons de justice. »
Quelles opportunités la communautarisation peut représenter pour les Maisons de justice ?
« C’est
une riche évolution pour nous. Je pense qu’on va réussir cette intégration
parce que, outre les missions qui viennent du fédéral, notre position à la FW-B
nous donnera des contacts privilégiés avec d’autres interlocuteurs qui opèrent
également dans la société civile. Du côté francophone, les entités fédérées ont
également décidé de confier l’aide aux détenus, l’aide aux justiciable, les
espaces-rencontres et la section des mineurs dessaisis de Saint-Hubert à
l’administration générale qui aura les Maisons de justice dans ses
attributions. Ce sont des matières très proches de ce que font les Maisons de
justice. Dans le respect des compétences et des spécificités de chacun, il y a
moyen de trouver des synergies et d’être plus cohérent dans les politiques
publiques à mettre en place. Là, je crois qu’il y a un espace pour le progrès. »
Et au contraire, quelles sont les craintes ressenties sur le terrain ?
« Je pense qu’on doit vraiment sécuriser les liens
privilégiés qu’on a pour le moment avec nos autorités mandantes. Tout un
travail qui a été réalisé au niveau des différents protocoles et accords de
coopération avec les autorités judiciaires.
Je pense qu’on a créé un cadre qui permet de garantir ces différents lieux de rencontre avec nos autorités mandantes. Ensuite c’est aux différents interlocuteurs qui les occupent de les faire vivre. La future Administration générale y veillera particulièrement. »